Whimsical and lunatic
Chers lecteurs, nous sommes aujourd'hui vendredi, ce jour surprenant qui suit jeudi tout en précèdant samedi. Cette caractéristique hautement remarquable n'aura surement pas échappé à votre perspicacité confondante.Par ailleurs, à moins d'être idiots, et seuls quelques uns d'entre vous le sont désespéremment, vous aurez remarqué que je ne bloggue-sauf rares exceptions- que ce jour là et heureusement, diront les plus mauvaises langues. Mais je m'égare. Nous sommes un vendredi d'un genre bien particulier : un vendredi portant l'estampille maudite du diable, ou alors celle marquée par la grâce de Godot, on ne sait plus très bien de nos jours. En tout cas un vendredi exceptionnel.Et bien, avec mon sens aigu du grandiose, je me suis dit qu'une telle rareté devait être fêtée en grande pompe, aussi ai-je concocté ce post, véritable merveille fabuleusement ininteressante et fantastiquement triviale.
Mais avant, une brève chronique des évènements insolites dont mon pays est le théâtre .Cette semaine, dans une obscure petite bourgade de nom de Mrirt, située dans le...euh... quelque part sur le territoire marocain a eu lieu la première peine prononcée pour un crime pas encore commis. Je m'explique. Ce qui s'est passé ressemble un peu à un remake déglamorisé de Minority Report :un jeune type à la peau huileuse, un peu crétin sur les bords, rêve que son voisin, trousseur de jupons invétéré, prend sauvagement sa maman (celle de l'échalas à frire) sur le carrelage de la cuisine. Une fois tiré de cette effroyable cauchemard, le jeune homme, paniqué et convaincu que sa vision est une prémonition, se lave le visage, s'habille pour aller au lycée,petit-déjeune de bon coeur, embrasse sa mère, et va tranquillement trucider son voisin d'un coup de poignard. Interrogé par la police déroutée,le jeune homme : "c'était de la légitime défense, il aurait violé ma mère, ce fils de chacal".Que répondre ? C'est flippant quand on y réfléchit. Imaginez que votre facteur, votre épicier, ou même votre meilleur ami rêve de vous commettant un crime. Il aurait alors toute légitimité pour vous occire sans rendre de compte à personne. Le procès du jeune visionnaire est en cours... Il y a aussi ce fait divers assez glauque qui s'est déroulé il n'y a pas longtemps à Meknes-la-Pustule, une ville décidemment plus trouble que sa façade déglinguée ne le laisse penser. Un avocat et sa femme se sont fait assassiner d'une manière digne de Hannibal le Cannibale :passés au hachoir à viande, réduits en kefta la jurisprudence, les objections, les votre Honneur, les effets de manche et tout le bazar. Je vais plus sortir du lycée moi, pas envie de me retrouver dans le sandwich d'un quidam parce que j'aurais croisé le chemin du Tueur à la tronçonneuse.
Mais vous le savez tous, il y a différentes façon de mourir. Rater son bac en est une, et certainement l'une des plus douloureuses. (Applaudissez à deux mains cette transition périlleuse accomplie avec brio) Apparament, tout le corps professoral s'accorde (ce qui est déjà en soi un évènement rarissime) à dire que nous sommes une bande de feignasses, et chacun à sa manière essaye d'être la pince à épiler magique qui nous otera ce monstrueux poil dans la main qui nous transforme en créatures hybrides,99%Popop-1%humain. Certains comme le prof de maths, jouent la carte du coach. Ca donne un truc genre "Le bac y se joue MAINTENANT! c'est pas le moment de se relâcher les TéSune, là ! C'est la dernière ligne droite, faut se donner à fond là !".Sérieux, il me fout les jetons. Il nous raconte les histoires de ses anciens élèves qui lui demandaient des tuyaux pour pas dormir et avoir de l'énergie, il nous exhorte à nous éxercer sur des annales à chaque heure de permanance, toussa. Ca me met plus mal à l'aise qu'autre chose, sachant que je ne fais plus rien depuis on va dire le bac blanc, soit quelque chose comme un mois et demie... Et s'il voyait ce à quoi j'occupe mes heures de permanence, il aurait une crise cardiaque. Tu as aussi le cas, plus rare, des profs qui sont eux aussi d'incorrigibles flemmards . Le genre à banaliser deux heures alors qu'on ne finira jamais le programme ou à te renvoyer à tes cours de première alors que tes cours de première, ils doivent maintenant servir de litière à une colonnie de rats dans une décharge publique, ou dans le meilleur des cas, de cornets à pépites chez le vendeur de fruits secs du coin. Le genre qui te fera jamais de fiches récapitulatives de la décolonisation et qui a le front d'affirmer que pour une compo "les connaissances ne sont pas si importantes que ça".
Mais bon. A part ça, il y a une expo pas mal qui s'organise au lycée, sous l'égide du prof-qui-s'en-fout-du-bac. Officiellement les élèves y participent, mais à part servir de manoeuvres pour déplacer les meubles, de scribes pour écrire les affiches, ou de colleurs pour-je vous le donne en mille- coller les photos, ils n'ont pas vraiment de rôle clé. Enfin c'est interessant de voir comment était le lycée avant. Il était beaucoup plus multiconfessionnel, avec des tas de français,des juifs sépharades, et des musulmans .Mais maintenant que Meknes-la-Pustule n'est plus vraiment un pôle d'attraction des étrangers (sauf les fous), la quasi totalité des élèves sont des marocains. Et puis il y avait des tas de clubs, un journal et tout.'Fin c'était chouette quoi.Je pense que c'est dans ces établissements-là que la France se fabrique ses admirateurs les plus inconditionnels. Moi par exemple, je remercie tous les jours le ciel que ma mère, ex de Descartes à Rabat, ait tenu tête à mon popa (qui à fait Moulay Ismael) et nous ait fait intégrer la Mission, à mon frère et moi. Franchement on peut dire ce qu'on veut de la France, mais on ne peut pas lui enlever que son enseignement est le meilleur du monde, pas seulement sur le plan des connaissances, mais surtout pour ce côté multiculturel, cette ouverture d'esprit... C'est spécial.
Arrêtons la les éloges. Passons à mon registre favori: les récriminations. Sujet de plainte numéro ouno: la bouffe. Cette semaine, les agents et les surveillants ont fait grève pour protester contre une hausse de leur I.G.R. Ben vous savez ce qu'on a eu à grailler ? Des CHIPS. Ouai ouai, des vulgaires chips grasses et dédjeulasses. Nan mais j'hallucine, elle est où la diététique s'il te plait, dans un repas constitué à 90 % de lipides, de sucres et de graisses ? Le stress du bac ne leur suffit pas, ils veulent nous achever en nous collant des problèmes cardio-vasculaires avec leur bouffe que Mc Do , il aurait honte de la servir ?
Sujet de plainte numéro dos: notre internat abrite des tarés mentaux. Une prostituée, deux-trois drogués, comment bosser au milieu de gens comme ça ? Jeudi soir, c'était le summum de la folie: une fille a fait semblant de tourner de l'oeil dans le couloir. Putain, elle jouait tellement bien la comédie que si je n'étais pas au courant du truc, j'aurais complètement paniqué. C'est d'ailleurs ce qu'a fait la pauvre surveillante de service cette nuit-là. C'était la foire, avec des cris, des éclats de rire, et tout le monde en train de filmer la soi-disant évanouie, genre super crédible. M'enfin je dois reconnaitre que c'était vraiment super marrant.
Sujet de plainte numéro tresse: mon intro ne colle pas, parce que quand je validerais ce post, il sera samedi 14. Fuck.
J'aurais bien continué, mais je me lève tot demain. (pas pour gratter des exos, mais pour aller à Rabat essayer de trouver un bout de tissu qui pourrait me servir de robe de bal pour ce bal qui ne me dit plus rien du tout)
Bonne nuit, gens d'ici et d'ailleurs.